De l’ombre à la lumière
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La naissance d’une grande amitié, Merci Sergio de me faire confiance et de m’autoriser à parler de toi.
À une époque où les grandes déclarations font souvent écran aux gestes essentiels, le parcours de Serge Kurschat se distingue par sa cohérence silencieuse. Un itinéraire tissé d’endurance, de rigueur et de dévouement — d’abord forgé dans les zones d’ombre du conflit, puis affiné au contact des blessures humaines.

Né le 4 février 1974 à Strasbourg, Serge Kurschat grandit en Corse, île rude et lumineuse qui lui inculque très tôt le sens de la nature, de la solitude et d’un dépassement enraciné. À vingt ans, il intègre l’École des fusiliers marins de Lorient, avant d’être sélectionné pour les commandos marine, au sein du redouté commando de Montfort. Cet univers d’élite devient rapidement pour lui une école du dépassement extrême. Il y obtient de nombreuses qualifications : commando jungle, ski de combat, parachutisme, close-combat, tir, escalade, transmissions radio, ainsi qu’une formation en démolition et en survie dans les milieux les plus hostiles.








Au cœur des conflits africains des années 1990, il prend part à plusieurs opérations vitales d’exfiltration et de sauvetage. En Sierra Leone, lors de l’opération Espadon (1997), il contribue à l’évacuation de près de 1 000 ressortissants de 23 nationalités en une seule journée, alors que Freetown bascule dans la guerre civile. Peu après, au Congo-Brazzaville et à Kinshasa, il participe aux opérations Pélican I & II, destinées à protéger plusieurs milliers de civils pris dans le chaos des affrontements. Son sang-froid et la précision de son engagement lui valent une lettre de félicitations officielle du ministère des Armées français.




Au-delà de ces missions spectaculaires, Kurschat participe à des opérations contre la piraterie, à la lutte contre le narcotrafic et à des exercices multinationaux de sauvetage humanitaire. Ce vécu de terrain, à la fois dense et tragique, le confronte non seulement à la mort, mais surtout à ce qu’elle laisse derrière elle : des vies disloquées, des corps à reconstruire, des âmes à relever.



C’est là que commence son second engagement.
Titulaire d’un master en sciences humaines et sociales, obtenu summa cum laude à l’Université de Franche-Comté, il se réinvente en homme de mémoire et de création. Historien de terrain, il publie Pierre-Nicolas Chenaux, le révolté gruérien (2017) et Honneur (2019), où il explore les marges de l’histoire, les héros effacés, et les formes discrètes de résistance humaine. Il collabore aussi à des revues telles que Le Temps, Passé Simple ou encore la Revue Militaire Suisse.


Mais Serge Kurschat ne s’arrête pas à l’écriture académique. Il est aussi poète, slameur, et artiste multimédia, un créateur habité par la mémoire et le vivant. À travers des textes puissants, des performances orales et des créations audiovisuelles, il explore les territoires intérieurs, les blessures invisibles, les résurrections muettes. Sa parole se fait chant, coup de poing ou caresse — toujours au service d’un relèvement possible.


Installé en Suisse, il met ses compétences au service de la réparation. À la tête de sa société, il forme depuis plus d’une décennie des milliers de personnes vulnérables : jeunes en rupture, femmes victimes de violences, aidants, personnels exposés… À travers les arts martiaux, la self-défense, le secourisme, mais aussi la parole et la création, il transmet bien plus que des outils : une confiance retrouvée, une dignité restaurée, un redressement symbolique qu’il nomme, sans emphase, « justice silencieuse ».
À ce jour, ses programmes ont touché directement ou indirectement plusieurs milliers de bénéficiaires.
Ses actions humanitaires, notamment en Afrique, ont permis le sauvetage concret de nombreuses vies. C’est peut-être là son plus grand accomplissement : avoir fait de son passé guerrier un outil de reconstruction collective.
En parallèle, il fonde l’École d’échecs de la Gruyère, convaincu que stratégie, patience et maîtrise intérieure sont aussi essentielles que la défense physique. Il mène également un long travail de mémoire autour de la mythique Voie de l’Inconscient, piste d’audace située à Djibouti, tracée en 1976 par cinq commandos français. Grâce à ses recherches et à un documentaire diffusé en 2022, les véritables fondateurs ont enfin été reconnus, lors d’une cérémonie officielle, près d’un demi-siècle plus tard.
« J’essaie simplement, murmure-t-il un jour, de rendre leur voix à ceux qu’on oublie. »
Dans une époque dominée par l’instantané et l’image, Serge Kurschat fait le choix du travail de fond, à contre-courant du vacarme. Par ses gestes, ses écrits, ses œuvres et ses engagements, il tisse, loin des projecteurs, une œuvre discrète, mais nécessaire : celle d’un homme qui, après avoir été soldat de l’urgence, est devenu artisan de la mémoire, de la parole et de la réparation durable.
Récit et propos recueillis par Michel Zannelli.
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